La notion de résidence française au regard de la convention franco-russe (4 B et 750 ter du CGI)

La notion de résidence française au regard de la convention franco-russe (4 B et 750 ter du CGI)

Une proposition de rectification a réintégré un bien situé au Maroc dans le patrimoine taxable à l’ISF d’un contribuable de nationalité française qui travaille en Russie. L’administration fiscale considérait le contribuable comme résident fiscalement en France, son obligation fiscale étant, par conséquent, illimitée. Ce dernier soutenait que sa résidence fiscale se situait en Russie et que seuls ses biens situés en France devait être taxés conformément à l’article 750 ter du CGI.

En droit interne
Aux termes de l’article 4 B, 1 du CGI, sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France qu’elles soient de nationalité française ou étrangère :
– les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ;
– celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu’elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ;
– celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques.

Il suffit qu’un seul de ces trois critères soit démontré pour entraîner la domiciliation fiscale en France.

En l’espèce, la résidence fiscale française ne pouvant être retenue au regard des critères de l’article 4, B, 1 du CGI, il convient de se référer aux dispositions de la convention franco-russe du 26 novembre 1996 en vue d’éviter les doubles impositions en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune.

En droit conventionnel
Il convient d’examiner dans l’ordre, les critères de l’article 4 de ladite convention portant sur la résidence.

Sur la notion de foyer d’habitation permanent
La notion de foyer d’habitation, qui n’a pas le même sens en droit interne et en droit conventionnel, recouvre toute forme d’habitation que l’intéressé soit propriétaire ou locataire, toute résidence dont une personne dispose de manière durable. (BOI-INT-CVB-DZA-10-20120912 n°90).

Ainsi, un contribuable peut avoir deux foyers d’habitation au sens de la convention lorsqu’il a à sa disposition deux habitations dont chacune a un caractère permanent.

En l’espèce, le contribuable ayant deux foyers d’habitation permanent, un en Russie, lieu de sa résidence, l’autre en France, lieu où il détient une propriété. Il convient de se référer au centre de ses intérêts vitaux.

Sur la notion de centre des intérêts vitaux
Le centre des intérêts vitaux est déterminé en fonction des relations familiales et sociales de l’intéressé, ses occupations, ses activités politiques, culturelles ou autres, le siège de ses affaires, le lieu d’où il administre ses biens etc… Ces circonstances doivent être examinées dans leur ensemble et sans que soit établie une hiérarchie entre les liens économiques et les liens personnels (CE 17 décembre n°241920, 8e et 3e s.-s, Dardashti).

En l’espèce, le contribuable avait toute sa vie personnelle et familiale en Russie puisqu’il y vivait avec son épouse et ses enfants depuis plusieurs années. Sur le plan professionnel, il était directeur général d’une société russe.

Le centre de ses intérêts vitaux est donc situé en Russie.

Le contribuable soutenait, à titre subsidiaire, avoir son lieu de séjour habituel en Russie.

Sur la notion de lieu du séjour habituel
Le lieu du séjour habituel fait référence à la présence physique sur un territoire.

En effet, le contribuable peut avoir une résidence habituelle dans deux Etats et un séjour habituel dans deux Etats alors même que le décompte des jours passés dans un Etat serait supérieur au décompte des jours passés dans l’autre Etat.

Les commentaires du comité des affaires fiscales de l’OCDE (C (4) n°19) précisent que doivent être pris en considération, le cas échéant non seulement les séjours faits par le contribuable dans son foyer d’habitation mais aussi à tout autre endroit dans cet Etat.
Les conventions fiscales ne précisent pas sur quelle période doit comporter la comparaison.

Les séjours doivent porter sur une période « suffisamment longue » , pour permettre d’apprécier si la résidence dans chacun des deux Etats est habituelle et d’apprécier aussi la périodicité des séjours.

En l’espèce, le contribuable résidait plus de 188 jours de l’année en Russie durant au moins trois ans.

Il ressortait de son passeport que bien que le contribuable voyageât souvent, il ne séjourne que quelques
semaines par an en France.

Il devait donc être considéré comme étant un résident fiscal russe.

En conséquence, son obligation fiscale étant limitée à ses biens situés en France en matière d’ISF, conformément à l’article 750 ter du CGI, il ne pouvait être taxé au titre de son bien situé au Maroc.

Pour la gestion de ces problématiques, faire appel à un fiscaliste international est parfois nécessaire.